Livre : « Le culte de Mithra : du Mont Dol au Mont Saint Michel »
Octobre 2023
Du Dieu irano-persan Mithra au golfe normand-breton, une enquète historique en terre de mythes et de légendes, par Jean-Claude Voisin et Laurent Garreau, préface Delphine Davy (édition : L’Harmattan - collection : L’Iran en transition)
Le Festival Nouvelles Images Persanes vous propose une rencontre avec les auteurs de l’ouvrage :
Samedi 25 février 2023 de 11h à 12h à l’association François Duine, Cour de l’évêché, à Dol de Bretagne (Ille-et-Vilaine),
Dimanche 26 février 2023 à 13h30 au "Salon d’Histoire de Saint Aubin du Cormier (Ille-et-Vilaine)", Espace Bel Air, rue des Rochers.
D’après le récit qu’en fait Roger Faligot (Les sept portes du monde, Plon, 2010), le vitréen Pierre-Olivier Malherbe est le premier français à avoir foulé les chemins qui mènent à Ispahan, alors capitale de la Perse.
Ouverte sur le monde, la Bretagne est naturellement apparue comme une région de choix pour accueillir ce Festival Nouvelles Images Persanes et ce dialogue interculturel entre la France et l’Iran. Peut-être cela a-t-il à voir avec une relation très originale des Bretons avec les voyages, les mythes fondateurs et les légendes universelles.
Avec cet ouvrage « Le culte de Mithra : du Mont Dol au Mont Saint Michel », l’enquête historique à laquelle nous invitent Jean-Claude Voisin, ancien directeur de l’Institut Français de Téhéran, et Laurent Garreau, directeur artistique du Festival, trouve son origine dans une croyance locale qui atteste de traces d’un culte de Mithra, divinité d’origine iranienne, à l’emplacement même de notre « grand sanctuaire national » dans les Annales du Mont Saint Michel (avril 1986).
L’auteur Jean-Marie Onfroy y prétend qu’à l’époque romaine, sur le site de « la Merveille de l’Occident », un temple avait été dédié à Mithra, symbole de la lumière divine.
C’est le point de départ de cette enquête qui lient encore autrement la Perse et la Bretagne.
Résumé :
La rivalité historique entre ces deux hauts lieux, sentinelles respectives des régions normande et bretonne, fut tant spirituelle que politique. Les auteurs, après une enquête archéologique et une analyse critique des sources anciennes, démontent une idée développée au XVIIIe siècle : la présence d’un mithraeum au sommet du Mont-Dol. Mais si la présence d’un culte dédié au dieu perse n’a pu être démontrée, il n’en demeure pas moins que le Mont-Dol fut un haut lieu de la spiritualité, avant une récupération par les promoteurs du sanctuaire du Mont-Saint-Michel, Pippinides puis Carolingiens, dont les motivations furent spirituelles et politiques. L’analogie avec le dieu perse Mithra n’est cependant pas abandonnée, et les auteurs abordent la récupération de son culte par le christianisme en la personne de l’Archange Michel, dieu des armées et des frontières, notamment chez les Carolingiens.
Critique :
« Si le christianisme eût été arrêté dans sa croissance par quelque maladie mortelle, le monde eût été mithriaste. » Cette certitude d’Ernest Renan nous renseigne autant sur les conditions d’expansion de la chrétienté en Occident que sur les croyances païennes sur lesquelles cette religion s’est édifiée. En nous invitant dans cette investigation historique, les auteurs cherchent à soutenir une thèse qui fait de cette divinité d’origine indo-iranienne un personnage central de la conquête romaine. D’un polythéisme à l’autre, Mithra a traversé plusieurs contrées et plusieurs cosmogonies. Depuis une dizaine d’années, à la faveur de fouilles archéologiques qui permettent de les mettre à jour, la découverte de sanctuaires dédiés à cette divinité s’accentue. Localement, la croyance persistante en l’existence d’un culte de Mithra à proximité du Mont-Saint-Michel démontre son importance et la puissance de son rayonnement au début de l’ère chrétienne. Le Mont-Dol se présente comme le lieu d’un combat fratricide entre l’Archange Michel et le diable. Cette figure du diable a pris des formes très diverses et il est judicieux de rapprocher le meurtre du taureau, typique des pratiques mithraïques, de l’élimination du dragon par l’Archange Michel à l’honneur trente kilomètres plus loin. Cette enquête ne parvient pas à confirmer cette interprétation d’une présence de ce culte de Mithra proche du golfe normanno-breton. S’appuyant sur des sources écrites et des symboles polysémiques, elle peut se lire comme une argumentation en faveur de fouilles au sommet du rocher du Mont-Dol où, en 1778, l’abbé Rever avait découvert deux autels dits tauroboliques sujet à interprétations.
L’archéologie n’a pas encore parlé. Les auteurs se sont employés à faire le point sur cette hypothèse et plus globalement sur ces hauts lieux de spiritualité, sur l’histoire des croyances associées à ces traditions pour en interroger les origines et fondements scientifiques.
Le texte s’essaie au romanesque. Faisant suite à une histoire des martyrs perses Abdon et Sennen, du même Jean-Claude Voisin, on voudrait partager les multiples péripéties de ces aventures persanes en Occident chrétien. Du Dieu irano-persan Mithra au Dieu romain Jupiter en passant par les légendes arthuriennes, le Haut Moyen Âge armoricain et ces "marches de la Bretagne" constituent le théâtre de cette investigation en terre de mythes et de légendes. Pour démêler le vrai du faux, croyances et sciences ?
Jean-Claude Voisin et Laurent Garreau ont rencontré des historiens locaux à la passion communicative, ils ont consulté une documentation très riche et abondante aussi bien aux archives d’Avranches qu’à la Bibliothèque nationale de France ou qu’aux archives départementales d’Ille-et-Vilaine.
Laurent Cambon.
Critique parue le 05/02/23 sur le site "aVoir aLire"